autonomie

Le manque d’autonomie

L’autonomie, c’est la capacité à répondre par soi-même à ses propres besoins, de savoir faire des choix, trancher, prendre des décisions, des initiatives, expérimenter, et assumer les résultats et conséquences de ses actes. Mais l’autonomie n’est pas uniquement une question de capacité à faire telle ou telle chose seul. Elle a aussi un rapport avec le développement intellectuel, l’équilibre moral, et la façon dont on évolue dans la relation avec les autres : l’affirmation de soi, l’expression, la présence, l’écoute active, l’intérêt pour les choses, l’esprit d’analyse, la prise de recul, la prise d’initiative, le positionnement pour faire un choix, le savoir-faire ensemble et le savoir-faire seul. Autant de compétences relationnelles qui permettent à la personne d’expérimenter la vie, de pouvoir se sentir évoluer, de s’auto-évaluer pour reconnaître sa valeur grandissante.

Le dépendant affectif est à la base un enfant qui n’a pas été accompagné à l’autonomie de la meilleure façon qui soit. Cela s’enseigne dès que nous apprenons à marcher, à manger seul, à s’ouvrir au monde et à découvrir et expérimenter. Cela continue avec les challenges de la vie d’écolier, d’étudiant, et tout ce que la vie met sur notre chemin.

Ces adultes qui n’étaient pas conducteurs

Pour parvenir aux prises de risques permanentes durant les premières années d’apprentissage et de découverte de la vie, et oser surmonter ses peurs, l’enfant a besoin de ses parents ou tuteurs pour l’encourager, parfois pour lui confirmer la meilleure voie à prendre, pour lui expliquer et donner du sens à une mauvaise expérience, tout en l’invitant au courage, à la persévérance et la confiance en la réussite.

  • Le dépendant affectif n’a pas connu cette phase. Il a été un enfant qui a dû se débrouiller seul, ou alors entouré mais de parents trop exigeants et autoritaires, ou trop absents et effacés. Des parents qui pour diverses raisons, et pas forcément avec l’intention de nuire, qui n’ont pas su poser leur présence et accompagnement sur l’estime et la confiance en soi. Certains pensaient bien faire en challengeant les enfants, pensant que la vie du monde adulte n’est pas un monde de Bisounours, et qu’il leur fallait préparer leur progéniture aux dures réalités de la vie où compétition, froideur et mauvais coups font partie du quotidien. Ces enfants-là, quoiqu’ils aient pu faire, leurs résultats n’étaient jamais suffisants.
  • Il y a aussi le parent en difficulté ou en dépression qui, par manque d’énergie, n’a pas pu relayer toute la joie, l’engouement et la vitalité à l’enfant pour qu’il avance avec motivation et énergie positive. Celui-ci restera souvent dans la retenue et le très peu d’intérêt. Adulte, il aura besoin d’être constamment boosté, relancé.
  • Il y a aussi ces parents qui, par éducation, savent ordonner et recadrer sans jamais avoir eux-mêmes expérimenté la considération, le compliment, l’encouragement, le sentiment exprimé, partagé et la reconnaissance.
  • Enfin, il y a aussi l’enfant qui, pour une raison ou une autre, souvent un événement clé, a eu une perception ancrée que ses parents ne l’aiment pas parce qu’il n’est pas assez bien, pas assez à la hauteur, moins bien que… et se dépatouille tant bien que mal de son propre chef, allant d’échec en échec, de résistance en résistance, de blocage en blocage… la peur du rejet, de l’échec et de la honte le tétanisant.

Le recours systématique aux autres n’est pas la solution

Le dépendant affectif cherche de l’aide à l’extérieur pour répondre à ses besoins et pour gérer ses peurs. Il a conscience de ses manques et souhaiterait pouvoir être autonome et s’assumer, mais il n’y arrive pas parce qu’il pense ne pas être capable de réussir, et aussi parce qu’il est terrassé par la peur de se tromper et d’échouer. Ce qui entraînerait la moquerie, un rejet supplémentaire, et le regard de l’autre méprisant. Pour éviter d’en arriver là, il préfère se cantonner à dire et penser qu’il n’est pas capable et que pour telle et telle chose, il a besoin des autres.

L’expérience, le prix à payer pour acquérir l’autonomie

Souvent lorsque la personne reste dans l’entreprise, et pour gagner du temps et assurer l’efficacité, certains collaborateurs décident de faire pour l’autre ou à la place de l’autre. Ou voyant le dépendant affectif trop intimidé ou dans l’insécurité totale face à une procédure, de l’épauler, de lui permettre d’éviter et donc le surprotège.

Le problème lorsque nous faisons pour l’autre et que nous lui permettons d’agir dans la fuite et l’évitement, nous l’empêchons de surmonter ses angoisses, d’expérimenter, de relativiser, d’apprendre, de comprendre, et même de réussir. C’est comme si par une intention bienveillante, nous contribuions à renforcer son blocage et éviter son système de créativité, de recherche de solutions et d’instinct de survie à se mettre en route. Laisser agir par l’expérience est pourtant le bon chemin pour lui permettre d’acquérir l’autonomie.

Et si la personne n’est pas prête, il est bon de lui rappeler qu’en entreprise il est essentiel que chacun puisse en toute autonomie, remplir ses missions. Pour aller plus loin et l’aider à avancer, lui demander le cas échéant de quoi elle a besoin pour pouvoir être autonome et efficace. Au besoin recadrer car le recadrage (respectueux) a un effet boostant sur certains dépendants affectifs, tel un ancrage d’un système parental connu ou nécessaire.

Observez ensuite comment la personne s’investit, comment elle se concentre, fait le maximum pour s’améliorer et expérimenter. Ne la dérangez pas en pleine action sauf si vraiment elle devait être en grande difficulté. Offrez-lui des choix mais laissez-la trancher. Autorisez pour le moment qu’elle avance à son rythme. Transmettez-lui les meilleures pratiques avérées pour ses expériences. Acceptez l’erreur, l’à-peu-près, considérez qu’elle est en apprentissage donc en cours d’acquis de compétences. Obligez-la à entrer elle-même en contact avec les autres personnes en lien avec sa mission et laissez-la gérer la relation, les négociations et aussi les discussions un peu trop houleuses. Au besoin, revisitez avec elle les scènes et situations comme pour utiliser le débriefing dans un sens constructif et apprenant. Sans jamais juger mais en se fondant sur les faits, sur les émotions, sur la gestion des risques et par des questions l’ouvrir à de nouvelles pistes de conscience. À froid, félicitez-la des efforts, des premiers résultats, des acquis, du courage, des réussites. Surtout n’entrez pas dans la comparaison avec d’autres collègues plus performants, car le dépendant affectif le fait déjà un peu trop par lui-même, et c’est justement ce regard par rapport à d’autres « mieux et plus que lui » qui renforce sa conviction de ne jamais y arriver et d’être trop inférieur.

Au fil du temps, tâche après tâche, situation après situation lorsque le dépendant affectif fait preuve d’autonomie, voire excelle dans un domaine, c’est l’assurance qu’il se sent en confiance et en sécurité. Les ingrédients de base sont réunis pour qu’il puisse avancer seul dans ses missions. Tout ce cheminement contribue à construire son estime de lui-même, la reconnaissance de sa valeur, son sens des responsabilités, et encourage son engagement et sa volonté d’avancer et de progresser encore.

Dépendants affectifs, vous qui lisez peut-être ces lignes, prenez conscience de la meilleure façon qui soit de vous aider à acquérir l’autonomie. Laissez-vous inviter sur le chemin de l’expérimentation, du faire par soi-même. Vous y gagnerez beaucoup même si les premiers pas vous demandent à surmonter vos peurs et vos convictions les plus profondes. Courage ! Vous méritez vous aussi de pouvoir vous apprécier par le fait de découvrir toute votre valeur.

Extrait du livre “La dépendance affective au travail” de Geneviève Krebs, paru chez Eyrolles

Vous pouvez compléter votre travail sur vous par la lecture de ces deux ouvrages 

  • le livre bleu : pour comprendre, se situer face au trouble et savoir par où commencer un travail individuel. La deuxième partie de l’ouvrage offre un accompagnement précis et structuré.
  • le livre rouge : imagé d’histoires vécues, ce livre permet de comprendre l’impact de la dépendance affective dans le monde du travail, les risques pour la relation et la performance. Il propose en deuxième partie 20 fiches d’accompagnement.

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1 Commentaire sur “Le manque d’autonomieAdd yours →

  1. Je suis dépendante affective… et aujourd’hui je suis handicapé par cela dans ma perso et professionnelle…. un exemple frappant je ne veux pas conduire …. je ne m en sens pas capable … j ai plein d’idées mais je n’en fais rien ….je me sens constamment inutile …. je ne réponds jamais quand on m attaque …. bref je subis … et parfois il y a l’autre face ou je suis dans l’ attaque ou je fais payer mes frustrations… car je ne sais comment exprimer ce que je ressens autrement …. la solitude est ma pire phobie …. comment sortir de tout cela …j ai déjà été suivie mais je tournais en rond…ça ne m a rien apporté … car au plus je découvrais des choses sur moi au pire c’était …je suis un bouchon au milieu de l’eau et j ai peur de finir par me noyer…je me sens vide… mal dans ma peau …bref je suis en train de saboter ma vie …

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