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À la question : «Mais pourquoi ces femmes restent-elles ? », la réponse n’est jamais « parce qu’elles aiment ça » !

La femme dépendante affective insécure qui pense être coupable de ne pas être à la hauteur, et qui par conséquent quémande, pleure ou se rabaisse, ne fait pas de elle-même une personne sur qui il est autorisé de frapper.

La FEMME QUI SE VICTIMISE N’EST PAS COUPABLE DE LA VIOLENCE QU’ELLE SUBIT

La victimisation est différente d’être coupable d’être victime ! Personne n’a à le blâmer d’avoir donné le pouvoir à l’autre pour l’agresser, car à aucun moment, il ne l’a fait ! Face à la personne dont les comportements sont infantiles et victimisants, un conjoint aura parfois envie d’être à l’écoute ou d’aider à surmonter les peurs. Il peut être bienveillant, à l’écoute et sécurisant. Il peut se sentir bien dans cette position du conjoint-parent protecteur. Heureusement, tous les conjoints ne se transforment pas en adulte- parent tyran et criminel.

LA FEMME QUI RESTE dans un cadre violent ne FAIT PAS D’ELLE UNE COUPABLE

Le dépendant affectif insécure victime de violence conjugale reste parce qu’il a peur de l’abandon et du rejet. Cela réveille en lui des souffrances du passé qui lui font encore plus mal que certains coups physiques. Il subit une double peine : celle d’avoir eu à subir durant son enfance et celle que le climat dangereux fait perdurer à l’âge adulte. Et comme il a grandi avec la conviction de ne pas avoir suffisamment de qualités et de capacités pour répondre par lui-même à ses propres besoins, c’est un peu comme le bébé qui, s’il n’a plus son référent, est terrifié à l’idée qu’on ne prenne plus soin de lui en lui donnant de l’amour, de la nourriture, des soins, une sécurité, etc.

Tout un travail à mener avant de pouvoir partir

Partir demande à la victime tout un travail psychologique de fond sur son histoire et son fonctionnement, avant même d’aborder la situation présente qu’elle vit. Elle jongle entre une partie d’elle, consciente de l’urgence de partir, et une autre partie qui a trop peur et espère un mieux, un retour à la normale. Naïve, mais aussi tellement meurtrie des nombreuses blessures psychologiques sur son parcours. Les effets du cycle de la violence, notamment la période de lune de miel, lui permettent d’ouvrir la porte de la nouvelle chance, qu’elle accorde certes à son conjoint violent, mais aussi à elle et à toutes les conséquences que la rupture amènerait à assumer et à gérer, comme une famille brisée, les problèmes financiers, des dettes, des menaces de suicide ou de maltraitance des enfants, l’isolement, le jugement de la famille, et peut-être le passage devant un juge, etc. Tous ces facteurs angoissants qui, amplifiés par le manque de confiance et d’estime de soi, la tétanisent et la font aller et venir dans la relation, alternant départs et retours.

La femme subit la violence de façon insidieuse sur une période plus ou moins longue.

Lorsque la victime prend réellement conscience de ce qui se joue, et qu’elle parvient à refaire le puzzle, elle est déjà bien souvent enfermée dans le système de pression et n’a plus la force physique et encore moins psychologique pour agir. La violence agit sur tous les fronts; psychologique, physique, économique, sexuel, social… Tout est fait pour isoler et parfois détruire. De nombreuses conséquences physiques et psychologiques en résultent : troubles du comporte- ment alimentaire, insomnie, dépression, addictions, tentatives de suicide, etc. Comment alors pouvoir se projeter à l’extérieur de la relation avec un équilibre si précaire, ou totalement perdu ? L’instinct de survie trouve parfois qu’il est préférable de se suradapter et d’accepter l’inacceptable parce qu’à un instant t, pour la personne violentée, c’est le meilleur moyen pour survivre. Seules les fenêtres parfois de quelques minutes ou quelques heures peuvent être des ponts vers la libération. Mais là encore, avec la peur immense de se faire surprendre et d’en payer le prix, qui peut être encore un peu plus élevé : celui de sa vie.

À la question : «Mais pourquoi ces femmes restent-elles ? », la réponse n’est jamais « parce qu’elles aiment ça » !

L’important pour aider ces femmes en danger est d’assurer leur sécurité et celle de leurs enfants, quand elles ont bien sûr réussi à sortir de l’isolement (ou ont été sauvées par une personne qui a détecté et alerté la situation de violence conjugale) et ont pris la décision de quitter leur conjoint violent. Et ceci au moment du départ et même longtemps après, car le conjoint violent cherche à se venger et lui rappeler qu’elle est sa propriété longtemps encore après la rupture. Le nombre de féminicides après rupture1 en est la preuve douloureuse.

© Geneviève Krebs, extrait de son essai : Quand l’amour nous fait accepter l’inacceptable : la dépendance affective rend-elle plus vulnérable à la violence conjugale ?, livre paru chez Eyrolles en 2022.

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