L’ennui au travail (bore-out)

A l’heure où l’attention se pose essentiellement sur le burnout, apparaît ces dernières années le phénomène des conséquences de l’ennui au travail (bore-out) et notamment l’épuisement professionnel qu’induit le fait de s’ennuyer, de perdre goût à la tâche, et/ou de ne rien faire.

Comment peut-on s’ennuyer au travail ?

La journée d’un collaborateur touché par le bore-out peut ressembler à cela :

Très discrètement, il fait de son mieux pour que son inactivité ne se remarque pas. Le peu de choses à faire durant sa journée est pesant mais aussi frustrant. Si le plaisir d’avoir du temps au début est appréciable pour rattraper le retard sur des projets en cours, trier, ranger et se préparer à l’avenir, très rapidement, c’est l’interrogation qui s’installe fort de constater que le flux de travail et les échanges se font rares. Les quelques tâches qui lui sont confiées sont trop peu nombreuses pour l’occuper et si inintéressantes qu’elles ne parviennent pas à lui faire détourner le regard de la pendule. Depuis quelques temps déjà, il se rend bien compte que les uns et les autres le mettent à l’écart des décisions, des projets et aussi de la communication et de l’information qui pourraient le motiver et l’impliquer. Il se sent seul, même s’ils sont une bonne dizaine à œuvrer autour de lui. Personne ne le sollicite et les attitudes ne l’encouragent pas à prendre des initiatives. Le temps passe… trop lentement… et rien n’existe à part le vide, l’absence, le rejet, et ce sentiment de ne plus servir à rien et de n’être plus considéré et reconnu de personne.

Est-ce que cela voudrait dire que le bore-out est du à une sorte de mise au placard ?

Les causes du bore-out

La mise au placard peut être à l’origine de l’ennui au travail (bore-out) tout comme d’autres tentatives de manipulation par l’indifférence. Mais dans la plupart des cas, un travailleur peut se retrouver dans un sentiment d’ennui, tout en étant à l’abris de tentatives malsaines de harcèlement ou pression émotionnelle. Il s’agit de deux contextes à traiter différemment. Les risques de l’ennui au travail peuvent s’installer même dans un contexte de bienveillance. A y prêter attention, le ronron quotidien qui s’installe sur une longue période peut faire basculer un collaborateur, et même le faire fuir.

Un travail monotone dont on a fait le tour depuis des années déjà, agit directement sur le plaisir et l’intérêt à le faire. De même que des tâches dont le niveau d’exigences est faible et non évolutif aura le même effet. Se sentir enfermé dans un procédé sans jamais avoir la liberté de proposer des axes d’amélioration ou oser prendre des initiatives, peut toucher l’estime de soi et l’envie et la capacité à se réaliser.

L’ennui peut venir également d’un manque de compréhension de ce qui est attendu et demandé. Donner du sens à ce qui est fait et à l’importance du travail de chacun, permet au collaborateur de pouvoir comprendre sa valeur et vouloir s’élever à tous niveaux. Ne pas percevoir le but final et l’intérêt de son travail provoque une sensation de vide et d’inutilité.

L’humain a besoin de s’élever, de progresser

L’ennui au travail peut intervenir lorsqu’une absence de progression est constatée depuis des années. Progression ne veut pas forcément dire « augmentation de salaire ». La progression réside surtout dans l’opportunité de pouvoir apprendre, de s’ouvrir à des expériences nouvelles, d’échanger, de comprendre, de pouvoir projeter, espérer, et de pouvoir participer à un projet innovant et gratifiant.

Les conséquences de l’ennui au travail (bore-out)

Hormis l’insatisfaction au travail, la démotivation, le manque d’implication, et l’inattention qui peuvent provoquer des accidents du travail et des erreurs, l’impact se relève surtout au niveau des effets sur la santé et le comportement :

  • Stress
  • Dépression
  • Développement d’addiction
  • Angoisses
  • Perte de vitalité et d’énergie
  • Mise en échec
  • Perte de confiance et d’estime de soi
  • repli sur soi

Prévention et réglementation

Il est de la responsabilité de l’employeur de veiller au bien-être et à la santé de ses travailleurs. Il doit éliminer, sinon réduire tout ce qui peut engendrer un risque ou une atteinte à la santé. L’approche la plus efficace consiste à identifier dans les façons de faire, dans les types de management, dans l’organisation, et dans les diverses pratiques, tout ce qui peut être susceptible de provoquer de l’ennui, et agir !

Des démarches simples existent pour permettre à tout collaborateur de retrouver de l’intérêt à ce qu’il fait :

  • Enrichir le poste
  • Permettre d’aller plus loin dans une mission
  • Faire participer le plus grand nombre à la réflexion et aux propositions de progrès, innovation, créativité
  • Confier de nouvelles responsabilités
  • Faire le point sur les compétences acquises et les talents
  • Permettre de participer à de nouvelles formations
  • Travailler sur soi. Lui ouvrir les portes du développement de soi
  • Organiser une rotation de tâches ou de planning, tout en veillant à maintenir l’équilibre au niveau de la fatigue et du stress.
  • Expliquer ou ré-expliquer la stratégie, les attentes des clients, les enjeux, et du coup l’importance des métiers, des missions et des procédures. Donner du sens aux choses. Tout humain en a besoin.
  • Améliorer en permanence la façon de communiquer et encourager l’écoute, l’observation et le relationnel intelligent.
  • Assurer au maximum l’activité pour sécuriser les emplois et les rendre attractifs.

A bien y réfléchir, ne pensez-vous pas que l’ennui au travail n’est pas un phénomène nouveau ? Il répond uniquement au fonctionnement de l’humain qui a besoin de se réaliser, d’être reconnu, d’être utile, de sentir sa valeur, d’œuvrer dans une ambiance de plaisir et de savoir qu’il existe une possibilité d’évoluer tout en se sentant un minimum en sécurité.

Geneviève Krebs, copyright 2017

RAPPEL : « Si l’ennui au travail résulte d’une « mise au placard » délibérée, constitutive d’un processus de harcèlement moral, la réglementation particulière en matière d’interdiction et de prévention de ces agissements hostiles s’applique (articles L.1152-1 et suivants du Code du travail). Plus globalement, la prévention de l’ennui au travail s’inscrit dans le cadre de la prévention des risques psychosociaux, structurée par la réglementation de la prévention des risques professionnels. (en particulier les articles L.4121-1 et L.4121-2 du Code du Travail).

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